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Le blog voyage by Chapka

A 17 ans, Estelle effectue un tour du monde en bateau stop

A dix-sept ans, vous étiez certainement en train de préparer votre bac blanc, vous élaboriez des techniques nulles pour entrer en boîte de nuit et passiez votre temps à raconter des banalités sur des messageries instantanées. A dix-sept ans, Estelle a décidé de partir faire le tour du monde en bateau stop.

“Pensive, évasive et toujours perdue dans ses pensées”, “possédant trop de rêves que pourrait en contenir un si petit corps”, “vivant dans un monde de bisounours et d’utopie”. C’est ainsi qu’on a toujours défini la jeune Belge. Ils n’étaient pas nombreux à croire à son projet de départ. Pourtant, elle était plus que jamais motivée ! Dès ses quinze ans, Estelle a commencé à travailler dans une pizzeria à raison d’une à deux fois par semaine afin d’amasser suffisamment de sous pour voyager au long cours. Bercée par des romans d’aventuriers comme Moitessier, Stanley ou encore Robin Lee Graham, elle a toujours eu la bougeotte.

Rencontre avec une baroudeuse pas comme les autres !

Comment es-tu devenue accro à la navigation et au bateau stop ?

Voyager a toujours été naturel pour moi. Mon premier grand voyage était un séjour interculturel avec l’ONG Défi Belgique Afrique au Sénégal. J’en suis revenue grandie. C’était fantastique de se confronter et de rentrer dans une culture si éloignée de la nôtre. Puis je rêvais de l’Asie et de ses steppes, du transsibérien et de l’Inde et, par tout hasard, je me suis retrouvée à traverser l’Atlantique à la voile.

Estelle et son correspondant sénégalais Khadim.

Ça a été très facile pour moi étant donné que j’ai toujours navigué. Enfant, mes grands parents avaient un voilier de 11 mètres avec lequel on faisait de petites navigations. Ensuite, en grandissant j’ai enchaîné stage sur stage, toujours en dériveur et essentiellement en laser qui était devenu mon bateau préféré. À partir de ce moment-là, naviguer n’était plus une passion, c’était un mode de vie. J’ai fais de la régate, ma famille a fait l’acquisition d’un voilier “Mam’zelles” sur lequel je navigue avec ma maman et ma sœur, et j’ai commencé le bateau stop.

Ma première expérience en bateau stop, c’était avec un adorable couple de retraités que j’avais rencontré via la bourse aux équipiers, un site internet qui met en relation avec des skippers. Avec eux, je suis partie de Norvège pour rejoindre le sud des Pays-Bas.

Est-ce facile de faire du bateau stop ?

Quand on fait du bateau stop, pas besoin de savoir régler une voile ni même de lire une carte, même si c’est un véritable atout. Le bateau stop est basé sur l’échange. Si l’équipier est débutant, le skipper s’engage à lui enseigner les bases de la navigation. Il suffit d’être très motivé et d’avoir une bonne ouverture d’esprit. Le mieux est tout de même d’avoir déjà un minimum navigué afin d’épargner un éventuel mal de mer au skipper. Il ne faut pas se transformer en fardeau.

Attention, ce n’est pas toujours facile ! J’ai rencontré beaucoup d’équipiers qui ont été confrontés à des skippers imbuvables. Quand vous passez 20 jours sur l’Atlantique dans quelques mètres carrés, ça peut devenir un véritable calvaire. Moi même, j’ai vécu l’enfer sur un voilier qui ne bougeait pas du mouillage. À force de rester seule avec le capitaine, je suis devenue folle.

Trouver un bateau, en fonction d’où vous êtes dans le monde n’est pas toujours facile. Via la bourse aux équipiers, j’avais envoyé des dizaines de messages, posté plusieurs annonces et obtenu seulement une ou deux réponses, et celles-ci ne répondaient pas toujours à mes attentes. Quand on va directement aborder les skippers dans la marina ou sur la plage devant le mouillage, c’est plus simple, plus rapide et souvent plus efficace. Mais ça arrive de ne rien trouver et c’est souvent l’arrivée d’un coup de blues. Le monde du bateau stop est plus grand qu’on ne le croit, des groupes de bateaux stoppeurs se déploient dans les endroits stratégiques comme à Point-à-Pitre où ils dorment ensemble sous les cocotiers ou bien encore à Las Palmas (Canaries) où ils sont des dizaines à dormir sur la plage en attendant le précieux sésame.

« En apprenant mon âge, les personnes rencontrées sur la route étaient surprises, la plupart voyait ça d’un œil très positif, on m’a félicitée pour mon courage, on m’a encouragée à continuer jusqu’au bout ».

Estelle Debras, Discoverest

Quels sont les ports et les îles que tu as découvert en Europe ?

En Europe, j’ai découvert des lieux incroyables, des îles insoupçonnées et une nature grandiose. Au Danemark, les îles de Læsø (Osterby Havn) et d’Anholt m’ont surprises. On arrive dans des villages qui vivent majoritairement de la pêche, où les habitants se font tous mutuellement confiance et laissent toujours leur porte ouverte. Il existe des magasins sans vendeur ou chacun peut aller se servir et met l’argent dans une petite boîte. De plus, beaucoup d’habitants ont devant chez eux une étagère où ils vendent en utilisant le même principe les légumes qu’ils cultivent. Ça nous renvoie à une économie plus locale, à un système plus pure et plus humain.

Le principal port de Læsø au Danemark.

Je suis ensuite descendue jusqu’en Allemagne sur l’île d’Helligoland dont je ne soupçonnais même pas l’existence. Un rocher rouge-orangé au milieu de la mer du Nord qui accueille une colonie de fous de Bassan.

Et puis il y’a eu Texel, une île dans le nord des Pays-Bas où la nature est grandiose. Des dunes à perte de vue, encore et encore. Des réserves naturelles et un ciel très gris qui donne un air sinistre au paysage. Cependant, dès que le soleil perce , tout s’enchante.

Les dunes de sables et le phare de De Cocksdorp sur l’île de Texel.

Quelles sont les destinations incroyables à découvrir dans l’Europe méridionale ?

Lors de ma descente vers le sud, il y’a eu le Portugal. Des gens d’une gentillesse hors du commun et possédant une douceur de vie incroyable. Le seul point négatif du pays sont ses ruelles pavées, ainsi que ses trottoirs. En tongs, ça devient une véritable lutte pour ne pas glisser !

J’étais sur un bateau à Portimão quand j’ai rencontré Jakob, un Belge naviguant autour du monde sur son voilier de neuf mètres. Nous avons passés nos journées à découvrir les falaises de l’Algarve, toutes aussi somptueuses les unes que les autres. L’eau était émeraude et parfois nous découvrions des grottes et des plages inaccessibles depuis la terre. Je me souviens des hauts le cœur que la houle nous procurait en nous poussant vers les roches , nous étions en annexe gonflable et redoutions la crevaison.

Portimao et les falaises de l’Algrave.

Et au large de l’Afrique ?

Avec Hermano et Jakob, j’ai dépassé l’Europe pour naviguer au cœur du Sénégal. Une exploration en voilier jusqu’à cent kilomètres à l’intérieur du pays, là où il n’existe aucune carte papier et où même l’application Navionics échoue. Durant un mois, j’ai vécu au rythme du téléphone tam-tam dans les rivières de l’Afrique, au rythme du thé et du thiéboudiène, un plat de riz au poisson. Il y a eu des dizaines de talonnage, beaucoup d’efforts, de persévérance et un échouage. Il nous a fallu grimper en haut du mat pour repérer les bancs de sable, déchiffrer le balisage local et utiliser la faible brise du matin pour avancer sous voile car oui, nous avons un budget très limité et n’utilisons pas le moteur. Au fil du Saloum, les paysages ont commencé à changer. La savane a remplacé la Mangrove qui elle aussi a été remplacée par la forêt puis par un immense désert salé.

Tous les matins, les pêcheurs locaux nous apportaient du poisson ou des crustacés. Nous avons grâce à eux découvert des villages fantastiques inaccessibles par la route et autosuffisants. Je n’oublierais certainement jamais Omar et sa famille chez qui nous sommes restés manger, Bamba et sa grillade de poissons, Marc et son village flottant et enfin Moussa, devenu un bon ami.

J’ai doucement quitté la chaleur africaine pour l’ouest, en douceur puisque j’ai fais escale au Cap Vert, des îles au large du Sénégal. Je suis arrivée à Boa Vista où je me suis très vite adaptée au rythme Cap-verdien. Le catchupa (plat national), les restaurants pour 2-3 euros, les concerts live au soir, la musique tout le temps et partout et surtout, le rythme de vie. Je me suis fais tellement d’amis en une semaine… Voyager seule m’épuise plus que d’ordinaire étant donné le nombre de rencontres que l’on fait en si peu de temps ! Je repense avec nostalgie à Bour, un Malais chez qui je prenais tous les jours le thé en écoutant du reggae.. Ce qui m’a étonné au Cap Vert c’est le coût de la vie. On peut facilement vivre avec 15 euros par jour en logeant dans une hostel.

Praia de Chaves sur l’île de Boa Vista au Cap Vert.

J’ai quitté l’île en bateau stop pour Sao Nicolau, plus précisément à Carrical, un petit village isolé sur la côte sud et ne possédant pas de réseau. C’est là-bas que Jakob m’a rejoint le 24 décembre au soir. Je me souviens encore du jour où l’on cherchait du pain, les habitants nous présentaient tous du cake. Un homme nous a alors prévenu qu’ici, on ne mangeait que du cake. Le plus drôle c’est que, toutes les maisons possèdent un commerce et un bar. Tous les soirs, les hommes en font la tournée. Oui tous les soirs, nous avons voulu savoir si c’était uniquement pour les fêtes, et on nous a répondu que c’était ainsi toute l’année. Le village de cent personnes possédait même sa propre discothèque !

Comment s’est passée ta transatlantique ?

La traversée de l’Atlantique s’est effectuée en 19 jours. 19 jours au milieu d’un désert bleu, n’ayant que la vague à perte de vue. 19 jours d’intense bonheur. Naviguer donne accès à des milliers de petites choses que jamais les terriens ne pourront connaître. Imaginez vous au milieu d’un banc de poissons volants. Ou mieux encore, comment expliquer qu’il existe des milliards d’étoiles présentes dans la mer une fois la nuit tombée, plus communément appelées plancton phosphorescent. Impossible de mettre des mots sur ces moments passés seule à observer une pluie de météorites ou encore une éclipse lunaire. Qui pourra un jour se vanter d’avoir cogné une baleine en pleine course ? La mer est un être exceptionnel, naviguer quelque chose d’intense et de palpitant. J’aime sincèrement la mer et être en mer. C’est une méditation qui donne assez d’adrénaline pour affronter des ouragans et des calmes plats.

J’ai longtemps médité sur l’avenir, entre choix des études et de mode de vie. J’ai décidé de laisser place au temps et de profiter de mon voyage. Actuellement en Guadeloupe, je passe mon temps à manger des noix de coco sur Marie Galante et à randonner sur Basse Terre, la partie la plus tropicale de l’île. Récemment, j’ai effectué l’ascension de la Soufrière, un volcan encore actif. C’était beau, le sommet était incroyable. Des rafales de vent comme je n’en ai jamais vu, le vent m’a entraîné à terre. De la brume, aucune vue si ce n’est les fleurs qui dansent dans l’air.

Quelle est la suite du programme ?

En ce qui concerne la suite du voyage , je pense continuer en voilier, avec un plus grand terrain de jeu cette fois-ci, le Pacifique ! Des îles, des cocotiers et des lagons turquoises. Du vent, des milles nautiques encore et encore. Même si je rêve secrètement de naviguer plus au sud, beaucoup plus au sud, sous les 40èmes…

1 commentaire

toto
toto

25 mai 2020

Et ben, il y en a qui ont de la chance!
Au fait, la baleine cognée va bien?

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