1. Accueil
  2. Mes vacances
  3. Idées de vacances
Le blog voyage by Chapka

6 villes où s’arrêter sur la route du Blues aux USA

Article rédigé par Marc Nouaux (Les Cahiers Vagabonds). Photographies : Famille Pollet-Villard.

La route du Blues, c’est 1 000 miles (1 600 km) si on trace par la route la plus directe entre Nouvelle-Orléans et Chicago. La première question est : dans quel sens démarrer ? La majorité des tours opérateurs propose de commencer par Chicago pour finir par la Louisiane. De notre côté, on a fait le choix inverse. Et comme on est sympa, on vous partage notre programme, histoire de vous donner quelques idées… Voici donc six villes où s’arrêter quelque part entre Chicago et Nouvelle-Orléans, quelque part sur la route du Blues.

Lafayette, sur les traces des Cajuns

Bon, on ne va pas vous mentir, ça n’est pas encore la « vraie » route du blues mais on ne peut pas esquiver cette halte car Lafayette est vraiment cool ! Errant au hasard des rues du centre, on se retrouve au Blue Moon, une guest-house qui fait aussi office de saloon. On y rencontre des jeunes et des vieux heureux d’écouter de la musique ou de danser en sirotant une bière dans une vieille bicoque en bois. Une bonne première étape musicale après avoir déjà goûté à des concerts à la Nouvelle-Orléans ! Surtout, il nous permet de découvrir la sociabilité spontanée des Américains, toujours prêts à engager conversation. Pour l’accent, en revanche, il faut s’accrocher…

Natchez, dans un vieux saloon où Mark Twain a rédigé Tom Sawyer

Vous ne le saviez peut-être pas mais Mark Twain, avant d’être écrivain, était un pilote de bateau-vapeur sur le Mississipi. Il a d’ailleurs rédigé un récit de voyage autobiographique en deux tomes au sujet de cette expérience – Mark Twain étant un pseudo qui signifie « par deux brasses de fond », terme souvent utilisé pendant la navigation sur le fleuve. On a donc marché sur ses traces…

Lors du stop à Natchez, on séjourne dans une maison en bois située dans un petit quartier résidentiel où trônent de nombreux manoirs. L’endroit donne l’impression de remonter le temps. L’expérience locale ne s’arrête là : arpentant doucement les rues désertées par l’été, on s’approche du mythique Mississipi qui creuse ici une magnifique et verdoyante forêt. A deux pas de la rive, on pousse les portes d’un saloon, le Under-the-Hill. Parquet grinçant, plafond recouvert de billets de 1 dollar, tables collantes de bière, banquettes et chaises en bois… Le vieux pub de la deep america tel qu’on se l’imagine. Derrière le comptoir, une vieille dame blonde fatiguée et désagréable aux airs d’Iggy Pop – on la rebaptisera Aigrie Pop – sert nonchalamment les bières. À côté de nous, un amateur d’armes à feu, chapeau de cow-boy vissé sur le crâne, dresse fièrement l’historique des lieux : « C’est le plus vieux pub de la ville et Mark Twain a rédigé plusieurs chapitres de Tom Sawyer ici, dans ce saloon. » Puis sa voix est recouverte par la musique jouée par trois sexagénaires on fire. Un couple bourré raconte qu’il a fait quarante bornes et traversé le Mississipi exprès pour venir écouter les gars jouer : « ils sont forts et le saloon est réputé ». Une autre blonde peroxydée tente de séduire l’un des nôtres en cherchant à partager son tabouret mais c’est peine perdue. L’Amérique est ivre mais gentiment ivre, sociable, à la cool. Elle s’éclate juste et aime danser à Natchez.

À la sortie de la ville, ce sont les fantômes qui se reposent. Natchez tient son nom de la tribu d’indiens qui a longtemps peuplé son territoire. Devoir de mémoire nécessaire après les joies de la veille. Et la route ne fait que commencer.

Le pont Natchez-Vidalia enjambe le Mississipi ©Famille Pollet-Villard

Clarksdale, au musée du Blues

Entre Vicksburg et Memphis, il est intéressant de s’arrêter à Clarksdale. Quelques bornes avant d’arriver, un détour est obligatoire par Rosedale où se trouve un croisement connu pour une drôle d’histoire. En effet, au niveau de l’intersection de la route 8 et de la route 1, un certain Robert Johnson a vendu son âme au diable. Ce guitariste et chanteur de blues, mort à 27 ans (encore un membre du club des 27, tiens !), aurait, selon ses dires, pactisé avec le diable pour enfin devenir un virtuose de la gratte. S’il n’y a pas grand-chose à faire à cet endroit, l’idée saugrenue de ce pacte amuse toujours les voyageurs qui aiment faire étape par ce croisement posté au milieu de nulle part.

Ensuite, Clarksdale ouvre ses portes musicales. C’est une vraie plongée dans le Blues, notamment grâce à la qualité de son musée (Delta Blues Museum) dédié à cette musique. Vous y découvrirez les œuvres de tous les grands noms (Robert Johnson donc, mais aussi BB King, Muddy Waters et tous les autres…) et tout ce qui a attrait aux origines de ce style musical qui s’est ancré dans une Amérique racialisée. Le parcours des bluesmen, issus de familles qui ont souffert de l’esclavage, révèle un pan difficile de l’histoire mais donne aussi des clés de compréhension pour saisir les enjeux d’un pays qui est encore loin de la réconciliation.

Au sortir du musée, on est abordé par deux jeunes musiciens qui trainent devant le Ground Zero Blues Club, une institution dont l’un des propriétaires est l’éternel Morgan Freeman. Ils nous dédicacent un programme sur lesquels ils apparaissent, fiers de montrer leur travail. Ils discutent de tout et de rien avant d’entrer de nouveau dans le bâtiment. Ce qui surprend quand on découvre les Etats-Unis, c’est qu’il y a des concerts à n’importe quelle heure de la journée – et donc aussi des gens ivres à n’importe quelle heure, l’un allant rarement sans l’autre ! Le Ground Zero est en ébullition à l’intérieur tandis qu’à l’extérieur, sur l’esplanade, commence un concert en plein cagnard. Les spectateurs cherchent l’ombre mais la musique ne cesse jamais. Fin d’après-midi et le blues résiste face à la canicule.

Toujours dans l’attente du virement de Morgan Freeman pour refaire la façade ©Famille Pollet-Villard

Memphis, où l’on joue de la guitare avec la langue

Memphis, la ville d’Elvis Presley et celle où l’on a assassiné lâchement le Dr Martin Luther King Jr. Pour la première fois depuis le départ, on a eu la sensation d’enfin entrer dans un centre-ville où l’on est écrasé par les tours. Beale street un samedi soir : fermeture de la rue, encadrement par les flics et entrée payante (raisons de sécurité) pour s’immiscer dans l’enfer d’une fête américaine sous l’égide des néons. Un bordel monstre qui résonne de partout, des bars remplis, d’autres vides et de la musique à tous les coins de rue. Tout est cher, tout est grand, tout est bruyant. Le seul endroit où la musique se joue en extérieur est une petite cour calée entre deux bâtiments. La scène se prépare à un « jam » comme les Américains savent si bien le faire : des musiciens inconnus s’associent le temps d’une ou plusieurs chansons pour délivrer un concert. Là, rien ne va dans l’harmonie du groupe : le bassiste défoncé fume clope sur clope en tenue de basketteur, un énorme type au synthé semble s’endormir pendant les chansons et seul le gars aux percus ressemble à peu près à un musicien. Le chanteur, aussi gratteur, envoie un show du tonnerre malgré la mauvaise qualité du son. Dans l’assistance, un couple tout sauf glamour se roule des patins tout en se frottant l’un à l’autre après avoir dévoilé à la foule que c’était leur « anniversary ». L’excitation du public jaillit sur le chanteur qui se met à lécher les cordes de sa gratte avec la langue. Les notes continuent de pleuvoir devant le public incrédule. Le chaos d’une nuit à Memphis.

Le lendemain, c’est de nouveau un nécessaire devoir de mémoire qui incombe. Dans cette partie des États-Unis, la fête est aussi importante que l’apprentissage du vivre ensemble. Cap sur le Lorraine motel, reconverti en musée des droits civiques. C’est là, sur le balcon de la chambre N17, que Martin Luther King Jr a été assassiné. Le musée plonge le visiteur dans plusieurs siècles d’esclavage, de ségrégation, de lutte et de réconciliation. Sa richesse est exceptionnelle, grâce à des milliers de documents, films, témoignages ou affiches.

L’un des motels les plus célèbres des Etats-Unis ©Famille Pollet-Villard

En sortant de Memphis pour Nashville, on fait un petit détour par la banlieue sud pour prendre la direction d’un autre musée. Celui-là renvoie à une autre page de l’histoire de Memphis, celle du King ! Elvis Presley, from Tennessee, a fait ses armes à Memphis. Il a ensuite fait bâtir la propriété de Graceland, où toute sa mégalomanie s’est exprimée. Aujourd’hui, on y retrouve encore ses deux avions privés, ses dizaines de voitures de sport ou de collection, ses tenues ou ses disques d’or. Plusieurs salles à thèmes pour une expérience aussi enthousiasmante que déroutante. Il y a certes un petit côté Disney Land qui peut être désagréable mais il y a surtout l’étalage de la grandeur et de la folie à l’Américaine. Les fans du King ne peuvent être que séduits et ont les yeux qui brillent !

Avant de partir, on passe devant la façade de Sun Records, le célèbre studio de musique où serait né le rock n’roll au début des années 60. La musique ne s’arrête jamais à Memphis !

Le berceau du rock n’roll ©Famille Pollet-Villard

Nashville, où la country est reine

S’écarter du Mississipi, c’est entrer dans une autre Amérique, où les chapeaux de cow-boy et les santiags règnent dans les rues. Nashville est la ville des week-ends entre potes et l’on vient de tous les Etats-Unis grâce à des vols low-cost. EVG et EVJF sont organisés et la musique résonne toute la journée. À l’image de Memphis, une rue concentre tout le bordel et mieux vaut s’en écarter un peu pour trouver des ambiances plus softs avec une musique agréable.

Les bikers attendent que le feu passe au vert à Nashville ©Famille Pollet-Villard

On déniche un bar sympa qui sert un concert de très bonne qualité. Autre détail qui surprend aux Etats-Unis, ce sont les va et vient. Le temps du concert, le bar est tour à tour quasi désert, rempli ou moyennement fréquenté. Attention, toutefois, si on doit passer par la salle située à l’arrière qui mène vers les toilettes : dernière image avant de partir, celle d’un couple chaud comme la braise qui s’apprête à copuler sur les canapés.

Le deuxième soir, on tente un autre bar et c’est « open jam » du dimanche. Soyons honnêtes, ça part en sucette mais c’est aussi ce genre d’ambiance qu’on aime. Un gars avec un micro-casque et une tablette à la main organise les troupes en ordonnant à untel de déguerpir et à un autre de venir sur scène. Généralement, chacun fait entre deux et cinq chansons. Au menu du soir, un bassiste en béquilles qui met dix minutes à monter les marches pour atteindre la scène ; un festival d’incoordination et le clou du spectacle, un chanteur d’un certain âge, filmé par sa douce qui est au moins autant bourrée que lui. Le gars braille dans le micro, gueule sur ses camarades qu’il trouve trop mous et fait tomber le tabouret par inadvertance avant de refuser de quitter la scène, vexé que l’on ne reconnaisse pas son talent… Heureusement pour lui, sa douce le soutient fébrilement, invectivant aussi le staff qui ne sait pas apprécier les bons spectacles… Certes, l’oreille souffre mais on se marre, au détriment de cette star déchue !

Sébastien Tellier sur scène à Nashville ©Famille Pollet-Villard

La journée, c’est sympa de profiter de la halte pour se rendre dans le musée de la personnalité la plus célèbre de la ville : Memphis a Elvis, Nashville a Johnny Cash. Ensuite, on peut aller en fin de journée se promener ou faire du sport dans le Centennial Park, où trônent deux monuments incongrus : un banc baptisé Taylor Swift en hommage à la chanteuse et un Parthénon reconstitué à l’identique (avec toutes les colonnes !). Pour nous qui vivons à Athènes, on peut dire que la réplique n’atteint pas la cheville de l’original… Mais ce n’est pas pour visiter des temples antiques qu’on voyage aux Etats-Unis !

Saint-Louis, pour regarder les Cardinals

Pour couper la monotonie d’un trajet entre Nashville et Saint-Louis, petit détour par le Elk & Bison Prairie. On peut y faire un petit « safari » grâce à un circuit de quelques kilomètres que l’on arpente tout doucement en voiture. À travers la forêt, on guette d’abord les wapitis dont les bois se distinguent difficilement dans les feuillages. Ensuite, on est heureux et émerveillé de croiser un troupeau de bisons. On se gare, les yeux pleins d’étoiles et on s’inquiète un peu quand l’un d’entre eux vient se gratter les cornes sur le parechoc de la voiture.

Les prévisions de circulation sont assurées par des bisons futés ! ©Famille Pollet-Villard

À Saint-Louis, plusieurs activités sont bien cool. La Gateway Arch – attention, il ne faut pas être claustro ni avoir le vertige ! – qui surplombe le Mississipi, le Tower Grove Park proche du centre-ville mais surtout le Forest Green Park qui est immense. Et pour une expérience typiquement américaine, c’est chouette d’assister à un match de base-ball en soutenant l’équipe locale, les Cardinals de Saint-Louis. Pas de chance pour nous, les Cardinals prennent une volée contre les Californiens d’Oakland (0-9) et même pas un home-run à célébrer avec une foule en délire. Cependant, niveau malbouffe avec un bel hotdog ingurgité, contrat rempli !

Un job de jardinier à pourvoir à Saint-Louis ©Famille Pollet-Villard

Il ne reste plus que quatre heures de route pour rallier Chicago et finir en beauté ce séjour avec la visite d’une des plus passionnantes villes du pays ! Et, si c’est en été, profiter d’un énième concert joué en plein air dans le Millenium Park. De la musique, du début à la fin, encore et toujours et à toutes les sauces… Du blues, du rock, de la pop, de la country et même de la house (née à Chicago !) pour les oreilles plus averties : OUI, OUI, OUI, on en redemande !

0 commentaire

laisser un commentaire