DADJI : après un volontariat au Tchad, Elodie va parcourir la Grande Muraille Verte d’Afrique à pied
0| Mis à jour le 17 mars 2022
Elodie a 50 ans et trois (grands) enfants. Le dernier passe d’ailleurs le bac dans deux mois. Après un parcours plutôt classique -école de commerce, job à plein temps, vie familiale- elle décide en 2007 de changer son fusil d’épaule. Passionnée par la terre, elle entame une reconversion dans l’oléiculture, la culture et l’exploitation des oliviers afin de produire des olives de table et/ou de l’huile d’olive.
Son loisir préféré, le running, devient petit à petit une passion, voire une obsession, ou plutôt un médicament, une bouffée d’oxygène. Elle se lance dans de grands défis d’ultra-endurance tels que des trails de très longues distances, des Ironman. Ella participe même à la plus grande course de ski nordique. Grâce à ses courses, elle explore le monde tout en repoussant les limites de son corps et de son mental.
En 2017, elle traverse le lac Baïkal en char à glace. Une expédition en autonomie totale de 23 jours et 22 nuits sur la glace. Avec pour s’y rendre et en revenir des road trips à travers la Russie et la route de la soie.
A son retour, l’ONG La Guilde, qui lui attribue une bourse de l’aventure, lui propose de rejoindre l’équipe sur le sujet de la solidarité internationale. Son travail : envoyer des volontaires français en mission courte d’appui au développement.
En 2019, elle part avec son mari sur les côtes mauritaniennes afin de nettoyer les îles des oiseaux migrateurs. Prendre soin et protéger la biodiversité est un thème qui lui tient particulièrement à cœur.
Depuis, elle s’est formée plus professionnellement à la coordination de projets de solidarité internationale via l’institut Bioforce. Son nouveau projet l’a menée au cœur du Sahel, au Tchad. Puis va se poursuivre de Dakar à Djibouti. Elle nous raconte.
C’est quoi l’association Les Vents de la Récolte ?
Les Vents de la récolte, créée par Raphaël Molcard, est une association que j’ai connue avant même sa naissance. J’avais suivi Raphaël et son frère Joseph pendant leur service civique organisé via la Guilde. Ils avaient rejoint le Vietnam à vélo et apporté des graines qu’ils avaient planté dans les orphelinats. L’objectif était d’amener une souveraineté alimentaire grâce aux potagers-forêt. Cette histoire m’avait fortement inspirée, et j’ai souhaité les rencontrer plus personnellement à leur retour. Raphaël a ensuite voulu élargir leur action en créant une association et en y intégrant d’autres voyageurs « lents » ( à très faible impact carbone), qui sèment des graines à travers le monde pour une meilleure souveraineté alimentaire.
C’est quoi le projet DADJI, soutenu par l’association Les Vents de la Récolte ?
Dakar-Djibouti à pied, avec ou sur des dromadaires, parfois des ânes, sur le tracé de la Grande Muraille Verte d’Afrique (GMV). Inspirée des traditions caravanières mais aussi du grand relais de la flamme olympique, cette traversée vise à faire passer le fil vert de bout en bout. Telle le petit poucet, la méharée sèmera les graines de l’espoir sur son passage et récoltera les expériences des uns au service des autres.
La GMV est l’initiative phare du continent africain pour lutter contre les effets du changement climatique et de la désertification. Cette muraille d’environ 8000 km, mosaïque d’écosystèmes verts et productifs, est avant tout un programme global de développement durable et de lutte contre la pauvreté et l’insécurité alimentaire dans les pays du Sahel. Elle a pour objectif de restaurer 100 millions d’hectares, de créer 10 millions d’emplois et de séquestrer 250 millions de tonnes de carbone.
Ce projet, mené par Elodie Arrault, est ouvert à qui voudra participer à ce grand relais de septembre 2022 à septembre 2023.
Contact : 06 69 41 82 03. elodie.arrault@gmail.com
Elodie Arrault nous raconte son volontariat en agroforesterie au Tchad
Avant de se lancer dans le projet Dadji, Elodie a participé à un projet d’agroforesterie au Tchad d’octobre 2021 à mars 2022. Tout est lié !
Restauration des sols et reboisement
Je suis venue pour la première fois au Tchad courir la première édition d’un ultra trail, le Treg, dans la partie Sahara qui s’appelle l’Ennedi. J’en suis tombée amoureuse et j’y suis revenue en 2015. Puis en 2018 en faisant le circuit avec un nomade et un dromadaire. J’avais demandé cette faveur à l’organisateur car j’avais déjà une petite idée derrière la tête.
A l’issue de cette édition, j’ai prolongé mon séjour pour mon travail à la Guilde. J’avais été contactée par une petite ONG locale qui m’avait « repérée » : une amoureuse du Tchad qui envoyait des volontaires … la bonne aubaine ! Affaire conclue, j’ai ouvert un partenariat en rentrant en France, et nous avons envoyé plusieurs volontaires au Tchad.
Après la mise en sommeil des missions courtes de la Guilde, je suis restée en contact avec ce partenaire, que j’ai même reçu chez moi en France. Et j’ai décidé de partir à mon tour, l’affaire était toute tracée. L’idée était pour moi de valider mon diplôme Bioforce et de travailler concrètement sur le sujet de l’érosion des sols avant mon grand périple.
Au Tchad, j’ai pour tâche de coordonner le projet de restauration des sols et de reboisement depuis la ville de Mongo et dans la région du Guéra, en concertation et avec la participation d’une ONG locale. Nous mettons à profit la saison sèche pour semer les graines dans une pépinière et creuser des cuvettes zaï pour faciliter l’infiltration des futures eaux pluviales. Nous étudions quelle fumure nous y mettrons. En lien avec les bénéficiaires volontaires, nous déterminons les lieux des bosquets.
Ma mission consiste également à mettre l’association en lien avec les différents acteurs nationaux et internationaux (institutions, ambassade, ONG, fondations) dans ce domaine, à tisser des partenariats et à répondre à des appels à projets pour solliciter des financements.
Une journée type en tant que volontaire au Tchad
Les journées type sont plutôt très matinales avec un travail qui s’arrête vers 13h et qui reprend entre 15 et 17h. C’est évidemment lié au climat et aux fortes températures. Je n’ai pas connu la saison des pluies mais le travail s’adapte aussi à ces phénomènes.
Les horaires sont sans doute plus «européennes » en capitale à N’Djamena avec des bureaux climatisés. Il n’y pas d’activités le vendredi après-midi « à cause » de la prière. La population est majoritairement musulmane.
Il n’y pas de stress occidental et chacun peut se reposer à sa guise. Il y a une natte dans la cour du bureau et on peut s’y allonger à tout moment pour une sieste. La ponctualité n’est pas toujours au RDV… on parle de l’heure tchadienne 🙂
J’ai donc eu le loisir de découvrir d’autres choses que le travail (mais c’est en partie dû à l’activité de l’ONG dans le tourisme). J’ai fait la célébration traditionnelle du battage de mil, le festival des cultures nomades, des randonnées pédestres dans la montagne environnante et à vélo, un mariage traditionnel chez les nomades, etc. J’ai tout récemment fait du tourisme en allant au parc de Zakouma.
C’est une chance car je crois que les expatriés français qui travaillent dans les grosses ONG à N’Djamena n’ont pas trop le droit de sortir de leur périmètre « de sécurité ».
La thématique de la sécurité au Tchad
Contrairement à beaucoup de pays du Sahel, la carte du Ministère des Affaires Étrangères est beaucoup plus orange que rouge. Le Tchad qui a vécu autrefois la guerre souffre à son détriment d’une image de pays en conflit. Personnellement je m’y sens très en sécurité (en respectant néanmoins certaines règles comme ne pas sortir la nuit), mais il faut constamment être vigilant et avoir en tête que tout pourrait basculer en 24h, notamment à l’approche de la fin de période de transition militaire. C’est une destination qui mériterait d’être mieux connue, pour toutes les richesses qu’elle contient. Une diversité géographique qui s’étend du Sahara aux régions soudanaises, une immense richesse culturelle, une variété ethnique, une population très accueillante.
Ils sont comment les Tchadiens ?
les Tchadiens sont comme beaucoup d’Africains, extrêmement accueillants malgré une extrême pauvreté. Ils ont à cœur de faire découvrir leur pays, leur culture, leur famille. Ils vous invitent à boire le thé, à manger la boule (plat local qui est en fait une boule de céréales, sorte de polenta)
Le regard des proches sur le volontariat international
Globalement les proches sont encourageants, bienveillants, admiratifs. Ma famille s’est habituée.
Ce que pensent mes enfants ? Dans mon imaginaire, c’est quelque chose qui infuse en eux et dont ils auront conscience plus tard.
Ma fille aînée travaille actuellement à Taïpei comme journaliste chez Reporters sans frontières…certaines graines ont déjà germé on dirait.
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