Les aventures de Raphaël, étudiant en Argentine
1| Mis à jour le 2 juillet 2021
Raphaël est un esthète. Il aime les livres de Romain Gary, de Dostoïevski, le vieux cinéma italien (Antonioni, Visconti) et suit avec beaucoup d’attention les œuvres du réalisateur mexicain Iñarritu. Cet étudiant en master communication au Celsa (Paris IV) effectue actuellement un semestre pour ses études en Argentine à Buenos Aires, plus précisément à L’Université del Salvador. Une expérience des plus enrichissantes pour celui qui « appréhende la planète comme un terrain d’aventures, de découvertes et de rencontres humaines ».
Raconte-nous ton parcours !
Au sortir du lycée, j’ai choisi de faire une classe préparatoire littéraire par goût pour les sciences humaines et surtout pour répondre à un désir d’exigence intellectuelle. Mais j’avais profondément besoin de concret et de créativité. C’est pourquoi j’ai décidé de m’orienter vers une licence de communication au Celsa. Cela faisait longtemps que je rêvais de faire un échange à l’étranger. Je ne voulais pas seulement partir en voyage mais vivre une vraie expérience de longue durée, m’imprégner d’une nouvelle culture, d’une manière de vivre.
Pourquoi avoir choisi de partir étudier en Argentine ?
C’est d’abord une idée vague, indistincte, un film, un livre, des on-dit, puis le projet prend forme, il devient concret, il se matérialise. Ça devient une conviction. Après tout, il doit faire plutôt chaud là-bas et puis on y parle espagnol. Au début, on ne sait pas très bien pourquoi on part. On doit remplir des fiches et des dossiers d’inscription près d’un an à l’avance. Ça paraît toujours un peu dingue de se projeter comme ça dans un pays inconnu. Et puis au fur et à mesure que l’échange se concrétise, mes objectifs aussi se sont clarifiés. Je souhaitais à la fois prendre mon indépendance, apprendre à parler anglais, espagnol, et prendre un peu de recul par rapport à la France, à l’Europe.
Et puis Buenos Aires, ça fait rêver. C’est à la fois exotique et occidentalisé. On se voit déjà un maté à la main, déambuler dans des rues aux maisons de toutes les couleurs sur un fond de tango lancinant. On pense à Ushuaïa, à la Patagonie, aux chutes d’Iguaçu, à ces paysages de bout du monde. Et j’ai aussi de la famille là-bas. Je ne l’avais jamais rencontré avant de partir. Enfant, mon grand-père me racontait comment son père et ses frères avaient dû quitter la Pologne en catastrophe au début du siècle. L’un arrivait en France, l’autre en Argentine. Ils ne se sont jamais revus. Ce séjour d’études en Argentine était donc aussi l’occasion de renouer ces liens familiaux brisés par l’immigration.
Les cours sont-ils en espagnol ou en anglais ?
On parle espagnol à la fac et généralement anglais dans la colocation. L’anglais et l’espagnol, c’était un impératif pour moi. Les pays hispanophones offrent l’opportunité de progresser dans les deux langues et le coût de la vie y est beaucoup moins cher que dans les pays anglo-saxons type Angleterre ou États-Unis.
Comment s’organisent tes journées d’études à Buenos Aires ?
« N’oublies pas d’étudier ». Je lis cela souvent à la fin des mails que je reçois depuis que je suis parti en échange. C’est vrai qu’ici nous n’avons pas beaucoup d’heures de cours. En arrivant à la fac, on est toujours un peu livré à nous même. Déjà qu’en France c’est compliqué, alors en Argentine… Ici, il y a des centaines de facultés différentes. Impossible de s’y retrouver sur le site internet. Du coup on envoie des mails et ça n’en finit pas. On a des velléités de prendre des cours de théâtre, de philosophie et finalement on se retrouve en cours de droit international. L’objectif numéro un c’était quand même de condenser un maximum de cours le mardi, le mercredi et le jeudi pour avoir de longs weekends.
En Argentine, les rapports professeurs élèves sont beaucoup plus détendus, j’allais vite le découvrir. D’abord, lorsque l’on est reçu par un directeur de faculté la première fois, il ne faut pas être surpris si on vous fait la bise (une seule, comme le veut la coutume ici). Et lors de mes premiers cours, je n’ai pas été déçu. Ce n’est pas rare que les professeurs arrivent avec une vingtaine de minutes de retard, ensuite c’est le défilé des étudiants, certains arrivent jusqu’à trente minutes avant la fin du cours. Ça se lève, ça discute, ça se passe le maté.
Le maté est une institution. Pas question de refuser un maté qu’on vous propose, sinon on ne risque pas de se faire des amis. Et le maté se passe de mains en mains, tous les élèves collent leur bouche sur la même bombilla (paille) et même le prof se le récupère.
Ça nous change des cours de prépa et des lycées privés. Ici, on ne se lève pas quand le professeur rentre dans la salle, le vouvoiement n’existe pas de toute façon et le respect n’a pas la même définition.
Arriver en retard ça ne pose pas de problème, c’est normal, par contre refuser un maté c’est un vrai manque de respect et gare aux conséquences…
Au début, c’est un peu dur de suivre les cours en espagnol et puis l’oreille s’affine, on s’habitue. De manière générale, on est très loin du système d’éducation à la française, on peut oublier les cours structurés avec des grands I, trois sous-parties et une conclusion. On s’habitue aussi. Finalement, il y a pas mal de travail personnel, avec des essais à rendre et des travaux de groupes. Je n’ai pas rencontré tant d’argentins que cela à la fac. Les étudiants en échange se retrouvent toujours plus ou moins ensemble, c’est dommage mais c’est comme ça. C’était vraiment intéressant de découvrir l’histoire de l’Amérique Latine et de l’Argentine du « côté argentin », pas de cours d’histoire européo-centré, on découvre le pays de l’intérieur avec une vision chauvine certes mais en tout cas différente, c’est vrai que parfois l’opinion de nos professeurs sur Péron ou le rôle qu’a joué l’Argentine après la seconde guerre mondiale donne à réfléchir. Mais ce n’est pas parce que l’on est en échange universitaire que l’on perd notre esprit critique.
Bref, la fac m’aura finalement pas mal servi. J’y ai rencontré des gens supers. J’ai pas mal appris sur l’histoire du pays. J’ai perfectionné mon espagnol. J’ai découvert une autre ambiance de travail. N’est-ce pas cela justement tout l’intérêt de cet échange, s’ouvrir l’esprit, travailler oui mais surtout apprendre et découvrir, réfléchir et se remettre en question ? Et s’il y a beaucoup à dire sur notre système éducatif français, il a quand même du bon parfois. On s’en rend bien compte à l’étranger.
Je reste toujours convaincu que l’on apprend parfois tout autant en lisant un bon livre, en révisant un examen, qu’en dégustant une bonne cerveza avec ses amis à une terrasse de café.
Comment se passe la vie sur place ?
Le reste de la semaine, c’est surtout la vie en colocation qui prend le dessus. On se réveille, on va faire les courses, on prépare le repas étudiant classique (croque-monsieur, empanadas). Ensuite, je retrouve quelques amis pour travailler à Libros Del Pasaje, un super concept café/librairie avec une bonne connexion wifi, idéal pour les travaux de groupe. En fin d’après-midi, je vais taper la balle sur les courts de tennis. Le soir, on rentre à la colocation pour la prévia (apéro). Soit notre chef italien nous prépare ses succulentes pâtes, soit on fait un asado (barbecue) afin de profiter de notre grande terrasse. Il y a toujours beaucoup d’invités chez nous, un peu comme dans un moulin ou dans une auberge. Ça parle anglais, espagnol (argentin) et italien. Le week-end, on sort dans les bars et les restaurants branchés de Palermo. Le samedi soir, on va danser dans les boliche (discothèque électro).
Est-ce facile de se loger à Buenos Aires ?
J’ai eu la chance de récupérer la chambre d’un ami qui était aussi parti en échange universitaire. Ici, ce n’est pas très difficile de trouver un logement. Pas de dossiers, de listes d’attentes, ni même parfois de contrats. Il faut faire attention à bien récupérer le desposito (la caution). Beaucoup cherchent à Palermo, le quartier branché. C’est un peu plus cher mais ça vaut le coup. Sinon, il y a d’autres quartiers sympas : San Telmo, Almagro, etc.
Quel est le coût de la vie en Argentine ?
Avec la dévaluation du peso, le coût de la vie a augmenté. En règle générale, les transports, l’alimentaire et les biens de premières consommations demeurent bons marchés. Pour les loyers, s’ils restent moins chers qu’à Paris, ils sont tout de même relativement élevés.
Est-il possible de travailler un peu à côté pour gagner un peu d’argent ?
Trouver un job pendant un échange universitaire en Argentine, ça me paraît assez compliqué. Les visas étudiants ne permettent absolument pas de travailler sur le territoire et de nombreux bars ou restaurants demandent souvent des papiers. Il y a toujours la possibilité de trouver un petit boulot au black pour un salaire dérisoire. Certains arrivent à donner des cours de français ou à faire du babysitting. Sinon, j’avais pas mal d’amis en stage, rémunérés ou pas. La plupart le font pour l’expérience. Mais avec la crise qui frappe l’Argentine, il y a quand même un peu moins d’offres.
As-tu voyagé un peu en Argentine ?
Bien sûr. C’est un des éléments qui a motivé mon départ. En termes de voyages, l’année a été bien remplie. Salta, Córdoba, les chutes d’Iguaçu et la mythique Patagonie.
Des conseils à donner aux étudiants qui souhaitent tenter eux aussi l’expérience ?
Avant de commencer à donner des conseils, je voudrais surtout encourager les étudiants qui en ont l’opportunité de partir en échange à l’étranger. C’est une expérience unique. Une fois sur place et quelle que soit la destination, je conseillerais de choisir une bonne colocation, avec peu ou sans français. La clé d’un échange réussi, c’est de pouvoir s’immerger au maximum dans la culture du pays. Il faut avant tout rester ouvert, aussi bien avec les français qu’avec les étrangers. Ce sont les rencontres que vous ferez sur place qui feront la différence.
Enfin, comprendre les habitudes sociales d’un pays étranger me semble être un des enjeux essentiels de nos sociétés à l’heure où l’intolérance menace nos institutions. L’expatriation permet un enrichissement spirituel constant en prenant de la distance par rapport aux biens matériels et en s’enrichissant d’autres façons de vivre. Et puis il faut aussi avoir un peu de chance mais la chance, ça se provoque.
Quels sont tes projets futurs ?
Après six mois en Argentine, je tenais à rester en Amérique Latine, pour ajouter à mon expérience étudiante un aspect plus professionnel. C’est pourquoi j’ai décidé de prendre une année de césure entre mon master 1 et mon master 2, pour effectuer un stage à l’étranger. J’ai d’abord cherché en Argentine mais avec la situation économique actuelle, je me suis assez vite rendu compte que ça ne serait pas une chose facile. J’ai finalement eu une opportunité au Chili. Je commencerai donc un stage chez Publicis Santiago à partir de septembre. Ensuite, j’aimerais bien passer quelques mois à Madrid pour travailler et continuer à parler espagnol. Un de mes colocataires de Buenos Aires habite également là-bas, ça sera l’occasion de le retrouver.
J’aimerais également réaliser un stage à la Grameen Bank, la banque des pauvres créée par Muhammad Yunus, prix Nobel de la paix en 2006. C’est un projet qui me tient à cœur depuis longtemps. Après tout cela, je rentrerai en France (enfin) pour suivre mon master de 2 en alternance. Si tout va bien, j’aimerais pouvoir enchaîner avec un VIE, pourquoi pas à New York. Et surtout me prendre une année sabbatique pour écrire un peu !
Retrouvez le récit des aventures de Raphaël et notamment ses anecdotes sur les études à Buenos Aires sur son blog Diarios del Sur.
1 commentaire
Felix Fedlande
28 septembre 2017
Je suis Hatienne mais pour l'instant Je vis au bresil mais Je veux aller Studied en Argentine. Mais j'ai personne LA bas est ce que vous me le conseiller